Souvent banalisée, la consommation d’alcool peut pourtant avoir de lourdes répercussions : sur la santé bien sûr, mais aussi sur les relations sociales et le cadre professionnel. En entreprise par exemple, l’alcool est à lui seul à l’origine de 10 à 20 % des accidents de travail.
L’opération appelée « Dry January », ou mois sans alcool, donne l’opportunité de s’interroger sur sa consommation et de revoir ses habitudes.
Comment cela fonctionne ? Pourquoi questionner son rapport à l’alcool ? Nous vous expliquons.
Qu’est-ce que le Dry January ?
Originaire du Royaume-Uni, l'expression « Dry January » signifie littéralement « janvier sec » en français, qui pourrait être traduite par « janvier sobre ». Elle désigne une campagne de santé publique organisée pour la première fois en 2013, dont le principe consiste à lancer un défi collectif : ne pas boire d’alcool entre le 1er et le 31 janvier.
Cette campagne s’est étendue à partir des années 2020 dans les pays occidentaux comme la France, via les réseaux sociaux ainsi que les associations de lutte contre le cancer et de prévention de l’alcoolisme. En France, il s’agit notamment de la Ligue nationale contre le cancer, la Société française d'alcoologie ou encore la Fédération française d'addictologie.
Organisée juste après les fêtes de fin d’année, cette opération propose à chacun de faire une pause avec l’alcool pendant un mois et de prendre un temps de recul pour s’interroger sur sa consommation. Une pause qui permet également de constater rapidement les bénéfices de l’arrêt de l’alcool sur le corps humain : plus d’énergie, un sommeil de meilleure qualité, une plus belle peau, etc.
Sachant que quelques semaines suffisent pour casser une habitude, le Dry January peut être le point de départ d’un nouveau rapport plus modéré et plus sain avec l’alcool sur le long terme.
En 2023, plus d’un tiers des Français de plus de 18 ans envisageaient de participer au défi, soit plus de 17 millions de personnes.
Pour en savoir plus et rejoindre le Dry January, rendez-vous sur https://dryjanuary.fr/
Quels sont les dangers et impacts de la consommation d’alcool ?
Pour mieux appréhender les effets de l’alcool sur le corps humain, commençons par revenir sur son parcours dans l’organisme : après son ingestion et son arrivée jusqu’à l’estomac et aux intestins, l’alcool est absorbé dans le réseau sanguin puis répandu dans l'ensemble de l'organisme, en particulier les organes les plus irrigués que sont le foie, le cœur et le cerveau. C'est le foie qui va lentement transformer 95 % de l'alcool, à raison d’une dose d’alcool par heure en moyenne. Les 5 % restant seront éliminés par les poumons avec l'air expiré, les reins avec l'urine et la peau avec la sueur.
La consommation d’alcool expose à une toxicité importante pour l’organisme.
Dans les intestins par exemple, il va détruire les bactéries utiles à l’apport des nutriments (le microbiote intestinal), endommager la muqueuse de l’appareil digestif et favoriser l’absorption des toxines. Les effets sur les autres organes ne seront pas meilleurs. Dans le foie, l’alcool sera métabolisé par l’acétaldéhyde qui est cancérigène. Dans le cerveau, l’alcool va traverser la barrière hématoencéphalique qui joue un rôle de protection cérébrale. Dans le cœur, il va accélérer la fréquence cardiaque, etc.
A court terme, les effets de la consommation d’alcool sont les plus faciles à constater :
Phase d’excitation : sensation de détente, euphorie, désinhibition.
Phase d’ébriété : mauvaise coordination des mouvements, élocution troublée, état de somnolence, pertes de mémoire allant jusqu’au trou noir.
Coma éthylique : faute de soins, il peut provoquer la mort.
A moyen et long termes, la consommation d’alcool impactera le système nerveux et la santé mentale, augmentera significativement les risques de maladies cardiovasculaires, de maladie hépatique et de cancers, et affectera l’image de soi.
La consommation d’alcool est ainsi responsable de plus de 200 maladies et atteintes diverses. Certaines de ces pathologies sont exclusivement attribuables à l’alcool. Pour d’autres, il constitue un facteur de risque.
Au-delà des problèmes de santé, l’alcool est responsable d’accidents de la voie publique, d’agressions de tout type, et est un facteur de risques psychosociaux.
Conseils de prévention
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) alerte sur le fait qu’aucun niveau de consommation d'alcool n'est sans danger pour la santé. Fort du constat que l’alcool provoque des effets particulièrement nocifs sur le corps humain, comment réagir ?
Quelques repères
Les études scientifiques démontrent que la consommation d’alcool, même à des faibles niveaux, représente une menace pour la santé et que la “zéro consommation” d’alcool est le seul moyen d’éviter ces dangers.
Avec 10 g d’alcool pur dans un verre standard, les risques pour la santé sont présents dès la première goutte. Contrairement à une idée très répandue, un verre de whisky « standard », par exemple, ne contient pas plus d’alcool qu’un demi de bière. Certaines boissons sont plus concentrées en alcool pur que d’autres, mais elles sont aussi servies en plus petites doses. Ainsi, un verre de whisky standard contient entre 3 et 4 cl de liquide alors qu’un demi de bière en contient 25 cl.
Cependant, dans le but d’aider les consommateurs d’alcool occasionnels, Santé Publique France préconise de ne pas dépasser 2 verres d’alcool maximum par jour, et pas tous les jours, ce qui revient à ne pas consommer plus de 10 verres par semaine.
En cas de consommation d’alcool, Santé Publique France préconise également de limiter sa consommation à 4 verres maximum par occasion afin d’éviter le "binge drinking" (comportement d’alcoolisation ponctuelle importante).
Les effets bénéfiques de l’arrêt d’alcool
A court, moyen ou plus long terme, arrêter de consommer de l’alcool est synonyme de nombreux bénéfices sur la santé, le bien-être, mais également sur le porte-monnaie ! Parmi les plus significatifs :
- Diminution du risque d’apparition ou d’aggravation des maladies chroniques (cardio-vasculaires, diabète, etc.) et psychiatriques (dépression, anxiété, troubles du comportement, etc.).
- Diminution du risque d’apparition de cancers.
- Réduction du risque de développer une autre addiction.
- Amélioration de la qualité du sommeil.
- Amélioration, voire disparition, des troubles cognitifs (concentration, attention, mémoire).
- Rééquilibre alimentaire et contrôle du poids.
- Amélioration de la qualité de la peau.
- Economies financières.
Libérer la parole
Vous avez des doutes sur votre consommation d’alcool ?
Le questionnaire AUDIT (pour Alcohol Use Disorder Test) de l’OMS vous permet de vérifier si vous avez un usage à risque ou dangereux de l’alcool. Ce test comporte 10 questions et calcule un score sur une échelle de 0 à 40. Si ce score est compris entre 8 et 15, l’usage de l’alcool est qualifié de dangereux. Si ce score est supérieur à 15, cela suggère une dépendance.
Ce questionnaire est accessible sur www.addictaide.fr/pro/parcours/audit/
Face à des difficultés en lien avec l’alcool, la première étape consiste à en parler. Selon la situation, cela peut être à des proches de confiance, au médecin traitant, ou au médecin du travail/infirmier en santé au travail qui pourra orienter si besoin vers un professionnel de santé en addiction.
Il est également possible de prendre contact avec :
- Un CSAPA : Centre de Soins d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (centre pluridisciplinaire : addictologues, psychologues...).
- Un groupe d’entraide ou groupe de parole : www.alcool-info-service.fr ou www.addictaide.fr
La consommation d’alcool dans un cadre professionnel
Risques professionnels
Les problèmes de consommation d’alcool, comme toute substance addictive, restent rarement à la porte de l’entreprise. Dans le cas d’un usage dangereux de l’alcool notamment (réf. questionnaire AUDIT de l’OMS), le risque de perte d’emploi est ainsi multiplié par 1.5. Il est même doublé pour les personnes dépendantes.
En raison de ses effets sur le corps humain, l’alcool constitue par ailleurs un facteur de risque important d’accident de travail. A lui seul, il représente 10 à 20 % de ces accidents.
Prévenir la consommation excessive d’alcool signifie par conséquent prévenir à la fois les problèmes de santé, mais aussi le risque d’accident de travail, de perte d’emploi et les problèmes d’insertion socio-professionnelle.
Quelle responsabilité pour l’employeur ?
L’employeur a l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs (article L. 4121-1 du Code du travail). Les risques liés aux pratiques addictives doivent par conséquent être évalués au même titre que les autres risques professionnels et faire l’objet de mesures de prévention adaptées décrites dans le Document Unique d’Évaluation des Risques (DUERP).
L’employeur dispose de plusieurs leviers juridiques pour prévenir les risques liés aux pratiques addictives :
- Le Document Unique d’Évaluation des Risques.
- L’encadrement de la consommation de boissons alcoolisées dans l’entreprise. Le Code du travail indique que :
« aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail. Lorsque la consommation de boissons alcoolisées […] est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur […] prévoit dans le règlement intérieur ou, à défaut, par note de service les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d'accident » (article R. 4228-20 du Code du travail).
Le règlement intérieur peut en effet spécifier des mesures d’interdiction partielle ou totale de l’alcool sur le lieu de travail, des mesures d’encadrement des pots en entreprise ainsi qu’une liste de postes de sûreté ou de sécurité pour lesquels un dépistage de consommation de drogue ou d’alcool peut être pratiqué.
Vous êtes employeur et souhaitez aller plus loin dans la prévention des conduites addictives dans votre entreprise ?
Voici quelques ressources documentaires pour vous y aider :
- Guide de prévention des conduites addictives : que peuvent faire les représentants du personnel
- Webinaire INRS “Travail et pratiques addictives : comprendre et prévenir les risques”
- Webinaire Prev’Camps “Prévenir les conduites addictives en milieu professionnel”
- Document INRS “Prévenir les conduites addictives dans le cadre professionnel”
- Document Anact “Agir autrement pour prévenir les conduites addictives en milieu professionnel”
- Guide “L’alcool, le tabac et le cannabis augmentent ils les risques d’accidents du travail et de perte d’emploi ?”
En tant que service de prévention et de santé au travail, Thalie Santé accompagne les salariés et les entreprises dans la mise en œuvre de mesures de prévention des risques.
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